Le sac à main, ou comment chosifier votre partenaire

Avertissement : Si vous aimez la mode où si vous ne pensez jamais avec arrogance et condescendance au monde qui vous entoure, faites une demande d’asile au pays des fashion-licornes et fuyez…

Il existe un objet régulièrement pendu à votre bras, qui a la particularité d’être parfois pratique et qui, dans un monde parfait, ne devrait pas insulter le bon goût. Il ne s’agit bien évidemment ni d’une montre ni d’un vrai sac mais bien de votre partenaire du moment qui vous tient la main ou le bras, reconnaissant ainsi avec beaucoup d’humilité sa chosification. Et comme tout rôle consciemment accepté, il suppose des droits mais aussi des devoirs…

Et le devoir principal c’est d’être bien assorti à vos physionomie et silhouette sous peine de faire beaucoup de peine à ma vision de connasse arrogante! Car quelle torture pour mon doux regard d’esthète lorsque je me balade dans la rue et que j’assiste à l’étalage tragique du mauvais goût ambiant : que de couples hideusement mal assortis, de sac-à-main dont le choix est bâclé, de volumes qui jamais, au grand jamais, n’auraient du se rapprocher.

Dans ma grande mansuétude, je ne vais pas me contenter de critiquer, je vais aussi proposer des solutions, des conseils de pur bon sens qui vous mèneront à des ruptures indispensables à la splendeur du monde et vous remettront sur le droit chemin de la quête fantasmatique du sac-à-main fait pour vous.

Pour commencer, il faudrait un arrêté municipal pour interdire une trop grande différence de taille entre les partenaires. Un couple aux volumes approchants sera beaucoup plus équilibré et agréable à regarder. Si vous faites 1m40, dispensez nous d’assister à vos risibles tentatives pour atteindre l’Everest avec un partenaire culminant à 2m04. De même, si vous êtes voluptueusement dodu (ce qui est votre droit, je ne suis pas grossophobe), épargnez-nous des jeux de séduction avec une allumette car non seulement elle ne prendra pas feu avec sensualité (les métaphores littéraires sont traîtres et mensongères) mais vous risquez de la briser en deux en vous retournant malencontreusement dans un lit.

Car comme j’ai le bonheur ou le malheur (cela dépend évidemment de ce que mon imagination décadente me propose) de penser en images, c’est bien précisément dans un lit que toute l’abomination du sac-à-main mal assorti va vous sauter agressivement au visage. Les plus retors d’entre vous me diront qu’un petit être sera très maniable et que dans ce cas, le problème du partenaire de taille géante ne posera aucun problème. De même, une levrette de bon goût (les mêmes lecteurs retors me diront que s’il y a un goût à la levrette c’est que le problème de taille est ailleurs au fond de votre gorge mais je les ignorerai superbement) se pratiquera avec beaucoup plus d’élégance si vos verticalités sont proches. Si vous avez un doute, pensez photographie, imaginez un superbe cliché en noir et blanc de vos anatomies dénudées et vous verrez bien que la beauté est équilibre.

Ce qui m’amène à m’adresser à mes amies cougarisantes (ainsi qu’aux hommes avides de chair fraîche) avec beaucoup de compassion. Je ne veux pas vous lapider avec le gros caillou de l’évidence mais ayant moi même tenté quelques excursions en territoire jeuniste, j’en suis revenue échevelée et flattée mais vieillie. En effet lorsqu’un joli puma est accroché à votre bras avec son teint éclatant, son visage poupin, ses joues pleines, il accentue vos ridules, votre peau moins élastique et vous donne un air maussade. Je ne vous conseille pas pour autant de vous tourner vers la gérontophilie qui aura l’avantage de vous faire passer pour une jeune première ou pour les plus ambitieuses, une future héritière. Je vous suggérerai plutôt de seulement jouer avec ce type de sac-à-mains dans l’intimité, pavanez avec dans le secret de vos alcôves et laissez-le au placard quand vous sortez ou attaché au radiateur si vous êtes d’humeur taquine.

J’aurais pu conclure de façon optimiste en disant que le cœur a ses raisons que la raison ignore et que libre à chacun de s’exhiber avec des sacs-à-main contrefaits mais rien que de l’écrire ça m’écorche les doigts. Je vais donc me contenter de boire la coupe de mon cynisme jusqu’à la lie et vous dire que la quête de la moitié idéalisée se déroule dans une jungle jonchée d’accessoires multiples et variés et que bien peu, malgré leurs attraits objectifs sont taillés pour vous. Mais cependant, ne perdez pas tout espoir, la bride de votre sac-à-main idéal est certainement à portée de vos doigts.

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©CaroleDarkshaw2020

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